L’ordonnance du 30 octobre 2019 a modifié l’article 18 de la loi 65-557 et donc les règles relatives à l’élection du syndic.
Quelle durée pour le contrat ? Faut-il mettre le syndic en concurrence ou pas ? Dans quelles conditions ? A quelle date le contrat arrive-t-il à échéance ? Peut-on résilier le contrat et à quelle occasion ? Comment cela se déroulera-t-il lors de la passation en cas de changement de syndic ? …
Autant de questions auxquelles nous tenterons de répondre.
Le contrat de syndic
En premier lieu, rappelons que le contrat de syndic est un « contrat de mandat ».
Il a pour objet de définir les relations contractuelles entre le « mandant », personnalité morale et juridique qu’est le syndicat des copropriétaires, et son « mandataire » (représentant) qu’est le syndic.
Alors que le code civil est très clair pour ce qui concerne les « contrats à la consommation », les « contrats de mariage » ou tout autre contrat liant deux parties, il est quasiment taiseux sur le « contrat de mandat », particulièrement spécifique s’agissant de représenter un « groupe de consommateurs non professionnels ». Et pourtant, au regard du nombre de copropriétés, ce contrat doit être compris de tous ses bénéficiaires.
C’est pourquoi la législation évolue si fréquemment, au gré des évènements, des influences, des politiques (dernière en date pour ce qui concerne le sujet qui nous intéresse ici, l’ordonnance 2019-1101 du 30 octobre 2019, mais avant elle la loi ELAN en 2018 ; la « loi Macron » du 6 août 2015 ; le décret 2015-342 du 26 mars 2015 chargé de définir la trame du contrat de syndic ; la loi ALUR du 24 mars 2014 ; ou encore l’arrêté NOVELLI en 2010).
C’est bien cette succession de textes, qui parfois se contredisent, parfois font « marche arrière », qui crée autant l’incompréhension que l’incertitude ou le doute.
Prise d’effet, durée, échéance d’un contrat débattu en assemblée annuelle
Avant l’ordonnance 2019-1101, tant la facturation que les dates de prises d’effet et d’échéance étaient floues et discutables.
Il n’en est plus rien aujourd’hui.
Prise d’effet d’un contrat renouvelé avec le même syndic
S’agissant d’un contrat renouvelé avec le même syndic, le nouveau contrat prend effet le lendemain de l’échéance du précédent.
Échéance du contrat, renouvelé ou nouveau
Conformément à la lecture croisée de l’article 14 de la loi 65-557 et 43 du décret 67-223, l’assemblée générale doit se tenir dans les six mois qui suivent la clôture de l’exercice comptable.
Afin de permettre au syndic de tenir cette assemblée générale, la formule « date de clôture de l’exercice comptable + 6 mois » est légitimement utilisée pour déterminer la date d’échéance du contrat de syndic.
(Étant donné que les copropriétés clôturent majoritairement leurs comptes le 31 décembre, beaucoup de mandats de syndic arriveront à leur échéance le 30 juin).
Rien n’interdit formellement de fixer une date plus tardive si certaines copropriétés veulent se garantir contre le risque d’une assemblée non tenue avant l’échéance.
Mais cette décision pose tout de même un problème majeur en cas de changement de syndic, car l’assemblée générale désignant le nouveau syndic doit se tenir dans les trois mois qui précèdent l’échéance, ceci afin que le syndic ne revendique aucune indemnité pour « résiliation anticipée de son contrat d’une durée supérieure à 3 mois ».
Prise d’effet d’un contrat avec un nouveau syndic
Dans ce cas, la loi précise désormais que le contrat prend effet au plus tôt un jour franc après l’assemblée générale l’ayant adopté, donc au plus tôt le surlendemain de l’assemblée (et non le lendemain comme il est souvent suggéré).
Comme expliqué plus haut, l’assemblée doit dans ce cas se tenir dans les trois mois qui précèdent l’échéance du contrat en cours (donc entre le 1er avril et le 30 juin pour une copropriété dont le mandat de syndic échoit le 30 juin).
A l’occasion de l’assemblée générale élisant le nouveau syndic, il ne faut surtout pas omettre de débattre de la « résiliation anticipée du contrat en cours », à la même majorité que le vote sur le syndic - majorité absolue de l’article 25 -.
La date de résiliation anticipée retenue sera celle à laquelle cesse la facturation du contrat en cours.
Durée du contrat avec un nouveau syndic
S’agissant d’un contrat concurrent, si l’on considère qu’il échoit aussi à « date de clôture + 6 mois », il faut constater sa date de prise d’effet et compter la durée qui les sépare (exemple : prise d’effet le 15 avril pour une échéance le 30 juin de l’année suivante donc durée = 14 mois et 15 jours).
Il ne peut pas excéder 36 mois non plus, ce qui exclut quasi systématiquement un contrat de trois ans pour un contrat signé avec un nouveau syndic.
Prise d’effet, durée, échéance, d’un contrat résilié par l’une des parties
Contrat résilié à l’initiative du conseil syndical - ou de plusieurs copropriétaires représentant au moins 25% des voix du syndicat -
Le contrat ne peut être résilié que pour manquements flagrants du syndic. Il n’est pas question de résilier le contrat « sous le prétexte que le syndic ne répond pas à certains mails ».
Il est ici question de manquements liés à ses obligations contractuelles, ou au constat démontré de non-respect d’obligations légales ou réglementaires - sur autant de thématiques que les déclarations de sinistres ; les convocations d’assemblées générales ; les finances de la copropriété ; la gestion du personnel de l’immeuble ; les mutations ; … -, la liste est longue.
Dans ce cas, les demandeurs se procurent un ou plusieurs contrats concurrents, qu’ils notifient au syndic en exigeant la convocation d’une assemblée générale supplémentaire dans un délai raisonnable - qui respecte les délais de notification des convocations ainsi que l’agenda du syndic et les disponibilités de salles -.
Si le syndic ne donne aucune suite sous huit jours et que les faits reprochés sont graves, le président du conseil syndical peut procéder lui-même à la convocation de cette assemblée, en la notifiant au syndic.
Dans ce cas, s’agissant d’une résiliation pour fautes, l’échéance du contrat peut être bien supérieure à 3 mois, sans indemnité, et la question d’une « résiliation anticipée » n’a pas à être posée en ces termes.
La durée et la facturation du nouveau contrat quant à elles sont à calculer au prorata temporis.
Enfin, la date d’échéance du nouveau contrat reste conseillée à « jour de clôture + 6 mois ».
Contrat résilié à l’initiative du syndic
Le syndic peut lui aussi considérer de nombreux manquements du syndicat des copropriétaires qui viendrait à ne pas respecter ses obligations.
Exemple : refus de voter des travaux liés à la sécurité de l’immeuble, mettant en péril les biens ou les personnes.
Dans cette éventualité, le syndic en avise le conseil syndical par LRAR décrivant l’ensemble des manquements qu’il considère ; ce courrier doit laisser courir un délai minimum de deux mois avant l’envoi d’une convocation. Cela laisse le temps aux copropriétaires, notamment au conseil syndical, de se procurer un ou plusieurs contrats concurrents, qui seront impérativement transmis au syndic pour être joints à la convocation d’une assemblée générale supplémentaire convoquée à cet effet.
De la même manière que précédemment, l’assemblée qui élit le concurrent n’a pas à se prononcer sur une résiliation anticipée du contrat en cours, puisqu’il s’agit d’une volonté exprimée par le syndic. La facturation du contrat en cours cesse au jour du début du nouveau contrat.
Les règles liées à la durée et à la date d’échéance du nouveau contrat, ainsi qu’à sa facturation, restent identiques.
A NOTER
Dans l’éventualité où le syndic ne souhaiterait pas résilier son contrat en cours, mais tout simplement « ne pas présenter un contrat de renouvellement », il doit notifier cette information formellement au conseil syndical au plus tard dans les deux mois précédant l’envoi de la convocation, donc dans les trois mois précédant l’assemblée générale.
Dans ce cas particulier, il n’a pas obligation à justifier de la raison pour laquelle il ne souhaite pas présenter de contrat de renouvellement.
Mise en concurrence obligatoire et dispense de cette obligation
Mise en concurrence
La législation a été erratique sur ce point depuis la loi ALUR du 24 mars 2014.
La loi ALUR a imposé une mise en concurrence à chaque fois que l’élection du syndic était inscrite à l’ordre du jour ; puis la loi MACRON du 6 août 2015, a imposé une mise en concurrence triennale ; enfin, l’ordonnance du 30 octobre 2019 a apporté la version finale, reprenant globalement l’idée de la loi ALUR sur la mise en concurrence imposée à chaque fois que le contrat de syndic est inscrit à l’ordre du jour (En vue de l'information de l'assemblée générale appelée à se prononcer sur la désignation d'un syndic professionnel et sans que cette formalité ne soit prescrite à peine d'irrégularité de la décision de désignation du syndic, le conseil syndical met en concurrence plusieurs projets de contrats de syndic, établis conformément au contrat type).
Mais il ressort de cette ultime version que, bien qu’imposée au conseil syndical, l’élection du syndic non consécutive d’une mise en concurrence n’est pas contestable (… sans que cette formalité ne soit prescrite à peine d'irrégularité de la décision de désignation du syndic …).
Dispense de l’obligation de mise en concurrence
A noter enfin que l’assemblée générale peut également se prononcer sur la « dispense au conseil syndical de l’obligation de mise en concurrence », à la majorité absolue de l’article 25.
Cette dispense présente en réalité peu d’intérêt. Effectivement :
- Soit le conseil syndical est satisfait des services du syndic : dans ce cas, même s’il n’est pas dispensé de l’obligation de mise en concurrence, le syndicat des copropriétaires ne prend aucun risque à ce qu’elle ne soit pas réalisée, puisqu’aucune sanction ne découle de son absence ;
- Soit le conseil syndical n’est pas satisfait des services du syndic : dans ce cas, même s’il est dispensé de l’obligation de mise en concurrence, rien ne l’empêche de la mettre en œuvre.
Ajoutons à cela que tout copropriétaire est autorisé à assurer cette mise en concurrence et à exiger qu’elle soit inscrite à l’ordre du jour, en le notifiant au syndic dans les délais permettant qu’elle le soit, et en lui joignant le(s) contrat(s) concurrent(s) qu’il s’est procuré(s).
Donc voter la dispense ne met pas le syndic à l’abri, et n’empêche pas le conseil syndical ni les copropriétaires d’assurer une mise en concurrence ;
Ne pas la voter ne contraint pas le conseil syndical et ne met pas le syndic en danger, dès lors que la mission est remplie sérieusement et professionnellement.
Transmission des pièces au nouveau syndic
Là encore la loi ALUR du 24 mars 2014 et l’ordonnance du 30 octobre 2019 sont venues faire évoluer les règles relatives à la transmission des pièces au nouveau syndic.
La loi ALUR n’est venue que corriger le fait que « confier tout ou partie des archives à un prestataire spécialisé » est consécutif du choix du syndicat des copropriétaires et non du syndic.
L’ordonnance du 30 octobre 2019 quant à elle a apporté des modifications majeures :
- Diminution du délai de transmission de la situation de trésorerie : le syndic sortant dispose d’un délai de 15 jours à compter de la cessation de ses fonctions (un mois auparavant) ;
- Alors qu’auparavant la contrainte était la « transmission des fonds immédiatement disponibles », il s’agit désormais de la transmission des « références des comptes bancaires du syndicat et des coordonnées de la banque ».
Effectivement, le compte étant séparé, et propriété du syndicat des copropriétaires, le nouveau gestionnaire qui fournira la décision d’assemblée générale le désignant ainsi que copie de son contrat signé à la banque où se trouve le compte bancaire sera autorisé à effectuer les mouvements utiles.
- S’agissant du délai de transmission des archives, il est toujours d’un mois à partir de la cessation des fonctions du syndic sortant. Cependant, l’ordonnance du 30 octobre 2019 reconnaît formellement que ces archives peuvent être dématérialisées et transmises sous cette forme.
Pour le reste, aucune évolution majeure n’a été apportée par les textes récemment :
- Le syndic dispose d’un délai de deux mois après la cessation de son mandat pour « fournir au nouveau syndic l'état des comptes des copropriétaires ainsi que celui des comptes du syndicat, après apurement et clôture ».
Il est donc clair qu’il est de son devoir d’assurer la répartition consécutive de l’approbation des comptes ;
- « Après mise en demeure restée infructueuse, le syndic nouvellement désigné ou le président du conseil syndical pourra demander au président du tribunal judiciaire, statuant comme en matière de référé, d'ordonner sous astreinte la remise des pièces et des fonds mentionnés précédemment, ainsi que le versement des intérêts dus à compter de la mise en demeure, sans préjudice de tous dommages et intérêts ».
Donc, en cas de réticence de l’ancien syndic, le syndic nouvellement élu agira sans attendre pour obtenir les fonds, les références bancaires, les archives, etc …
A NOTER
Il est théoriquement du rôle de l’ancien syndic de solliciter le nouveau syndic pour fixer un rendez-vous permettant d’assurer la remise des pièces ;
Mais la déontologie, la tradition, et notamment la confraternité, font que c’est le nouveau syndic qui entreprend cette démarche et fait le déplacement chez son confrère.
Les syndics non renouvelés seront tout de même vigilants car, à défaut du respect de la confraternité par le syndic élu - c’est-à-dire si le syndic non renouvelé venait à attendre un rendez-vous que le nouveau syndic ne daignerait pas prendre -, ce serait le syndic non renouvelé qui serait recherché en responsabilité si les délais fixés par l’article 18.2 de la loi 65-557 et décrits ci-dessus n’étaient pas respectés.
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